La cavale du jour s’arrêtait dans un lieu où j’avais réservé en amont le droit à ce que l’on avale la pitance avec une faim de loup. En effet, j’étais déjà venu becqueter avec ardeur entre ces murs, sans la moindre torpeur. Connaissant donc mes quartiers, il était facile pour moi de guider mon invitée vers ce qui allait nous rassasier. Et lorsque l’on parlait de quantité mes élégants mulots, l’illustration arrivait in fine devant nos têtes de joyeux décérébrés. Dois-je vous préciser que mon dévolu n’avait pas été jeté sur un tian de légumes ou une tarte aux épinards, mais sur une friponne côte de cochon, aussi épaisse qu’une lanceuse de poids dans son falzar. Diable, rajoute-moi de la sauce au poivre vert jolie bistrotière !
La dernière bouchée de notre entrée à partager encore dans son loft buccal, que le morceau de viande apparaissait devant nos visages, interloqués par la grâce de l’animal. La bidoche, sûrement pudique, s’enveloppait confortement de son gras luisant. Dans un morceau comme celui-ci, la partie grassouillette n’est jamais là au hasard, mais bien pour que l’on lui fasse la fête. Vous savez ce que je pense des trieurs de saveurs dans ces cas-là… Hors de ma vue, ignorant scélérat ! Mazette, mais que voyait-on surplombant la vedette ? Nous distinguions bien une manifestation d’amidon, dans son contenant du bon. La frite, généreusement dorée, nous passait le message sur sa provenance « maison », et nous lui donnions en échange toute notre passion. Son aspect irrégulier faisait d’elle une divine sincère, que nous aspirions à baigner dans la piscine de poivre vert. Cela émeut le bout de la langue, comme me disait une ancienne amie.