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Epicurisme autour du suprême de volaille

Julien Fournier

Mardi midi fut la concrétisation d’une idée de génie, qui avait parcouru auparavant mon cortex de Ouistiti. J’avais en effet eu la bonne résolution de rassembler quelques amis restaurateurs, dans une cantine faisant constamment mon bonheur. Vous l’aurez compris, le projet portait, même avant son commencement, un danger incontestable. Réunir des prix Nobel n’est en somme pas compliqué, mais supporter leur immaturité en bout de goulot est un sacré boulot ! Le moment de convivialité que je m’apprêtais à embrasser était en résumé un bourbier, dont j’étais l’audacieux instigateur. Le rendez-vous donné à midi, je laçais mes chaussures sans appréhension, avec l’espoir de mettre dans mon organisme quelques bons flacons.

Le zouave qui avait la lourde tâche de nous recevoir est un bayonnais d’adoption, nîmois de naissance, mais avant tout esthète de la grappe. Le sapajou connaît le vin comme un boulanger ressentirait le pain. Devant lui, nous avons souvent hâte. Le voyage promettait des coups de soleil, et des crêpages de Chinon. Diable, que les convives m’accompagnant semblaient au comptoir aussi à l’aise qu’un maçon devant un mur. « Pourvu que ça dure, la belle aventure » chantait le philosophe Patrick Sébastien.

La journée devenait coquine, lorsque les popotiers de cœurs entamaient des débats enflammés sur des cuissons et autres ballottines. Le blanc bourguignon n’était pas un idéal Zémourien ici, mais plutôt la tapisserie de nos intérieurs loin d’être meurtris. L’apéritif battait son plein, ce qui ne m’empêchait pas de mettre un coup de rétine sur la carte du festin. Mazette, la salade de pied de cochon puis le suprême de volaille me faisait aussi baver qu’un escargot en bonne santé. Aussi, le jus de raisin creusait l’appétit de l’assemblée, qui ne rechignait pas lors de l’installation à la table de la sainte becquée. Quand tu aimes la vie, tu aimes partager avec autrui. À table !

L’ambiance s’élevait comme nos voix de barytons éraillés. Devant l’enchainement des bouteilles, aucun crêpage de Chinon n’était au programme. Le liquide tannique poussait à merveille mon entrée fantasmée. Les asperges qui côtoyaient les morceaux de pied, avaient des pointes à faire pâlir un vendeur de marteaux. Assurément, le chef était ce midi-là bien dans les clous. Et, que dire de la volaille, inondée d’un jus bienfaiteur que nous pourrions saucer à toute heure. La basse-cour, que je portais en haute estime, se consumait divinement sans se porter en victime. La poulaille à chair tendre paraissait apaisée sur son duvet d’écrasé. Les pommes de terre, lit douillé pour poulet gourmet, imbibaient magistralement le marécage sous mon nez. Nous jouissions alors de concert, devant la qualité de nos gamelles sincères. Nous nous goutions même la chique, pour comparer l’incomparable. Il trainait dans nos quartiers un merlu, une burrata, et surtout une bonne dose de joie.

L’heure de l’Armagnac sonnait, et nos haleines étaient déjà chargées de bonté. Même si l’air ambiant n’avait pas besoin d’être réchauffé, nous nous précipitions sur l’eau-de-vie comme des chameaux déshydratés. Biberonner gascon avec des hommes et femmes loin d’être cons, cela valait bien une petite chronique. Ces quelques mots accueillants existent, car des personnes de passion ont ouvert non pas des restaurants, mais leur cœur assurément.

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